File:Jean-Pierre Boutet, Un proche avenir, 2015 (17585210493).jpg

Aires Libres, rue Sainte-Catherine, Montréal

Dans leur diversité formelle, les installations sonores et cinétiques de Jean-Pierre Gauthier proposent des expériences à consonance ludique. En permettant à des éléments inanimés de réaliser des mouvements, le plus souvent sous forme de séquences saccadées et répétitives, ces structures mécanisées suscitent une forme d’empathie, notamment par la difficulté qu’elle ont à atteindre leur objectif ou encore à réaliser leur trajectoire de manière fluide. Devant des objets qui semblent pris dans un inéluctable cercle, comme en proie à un TOC, ou livrés à un sort, le spectateur peut en effet être enclin à se projeter dans des gestes maladroitement articulés par l’œuvre, et en souhaiter l’aboutissement.

Ces décalages volontaires sont d’ailleurs au cœur des considérations de l’artiste, pour qui la volonté de contrôle est pertinente dans la mesure où elle mène à un point limite où il y a justement une perte de contrôle. Les accidents qui arrivent en cours de production, les éléments qui s’entremêlent ou échappent au calcul initial de la dynamique entre les différents vecteurs, rajoutent à la qualité du système déployé : l’imperfection devient ainsi un paramètre central qui complexifie l’œuvre et en augmente la portée. Contrairement à une machine à dynamique précise, un système peut intégrer des variantes et se moduler à travers ses points d’interconnexion ou de rencontre, ce qui est selon l’artiste assez proche des schémas sociaux.

Un proche à venir s’inscrit précisément dans cette veine. L’assemblage de segments de cannes de bois usées se meut à la manière d’un insecte géant, un peu gauche, qui peine à réaliser son énigmatique gestuelle. Au point de vue structurel, avec un niveau de programmation très minimal, c’est le poids des objets qui est principalement en cause dans la spécificité des mouvements. Quant aux cannes de bois, il s’agit certes des outils par excellence pour palier à un handicap de motricité, mais elles réfèrent plus globalement à la notion de vieillesse. Comment serons-nous dans plusieurs décennies ? Seront-nous encore là ? Par son intitulé, l’œuvre renvoie tant à notre capacité à se projeter dans l’avenir qu’à la difficile réalité des personnes âgées dans l’expectative de voir arriver un visiteur, un être aimé. En ce sens aussi, l’œuvre appelle une forme d’empathie. Par extension, l’artiste interroge la fonctionnalité future des technologies robotisées comme soutien à la population vieillissante.

Aseman Sabet Commissaire

Pour plus d’information sur l’artiste : <a href="https://sites.google.com/site/jpgauthiermachines/" rel="nofollow">sites.google.com/site/jpgauthiermachines/</a>